Pays chaunois : vent de protestation contre le projet de cinq éoliennes

Depuis 2007, huit communes, dont Guivry et Beaumont-en-Beine, se battent contre la possible construction d’un parc éolien à la frontière axonaise et isarienne.
En sortant de Beaumont-en-Beine, direction Cugny ou Guiscard, la vue est imprenable sur un autre parc éolien, celui de Villeselve.


À mi-chemin entre Noyon (60) et Chauny (02), quelques éoliennes côtoient déjà le paysage frontalier à proximité de Guiscard (60) et d’un lieu reconnu pour ses sources, ses vallées et ses randonnées, nommé « La petite Suisse du Noyonnais ». Malgré les apparences, ces machines qui culminent à 126 mètres de hauteur sont loin de faire l’unanimité dans les départements de l’Aisne et de l’Oise. Car, si cinq autres mâts sont en projet, huit communes limitrophes se battent pour ne pas les voir implanter dans cette zone « emblématique ». Parmi elles : les axonaises Guivry et Beaumont-en-Beine.
Depuis huit ans maintenant, les deux villages forment ainsi « une coalition » avec les six autres bourgs isariens. Huit ans de lutte acharnée, entre illusions et désillusions, qui devraient voir son épilogue la semaine prochaine, au tribunal administratif d’Amiens. Leur but : faire annuler le permis de construire de l’instigateur du projet Maia Eolis.
« Ça se fera quand même »
Pourtant, tout avait bien commencé. En 2011, le conseil
municipal de Guiscard (60), commune directement impactée, vote contre le projet éolien. « Mais malgré l’assurance donnée oralement au maire de Guiscard de ne pas aller à l’encontre de la décision de son conseil, Maia Eolis a continué ses démarches pour implanter ses mâts », explique Joël Cottart, maire de Berlancourt, village situé à 3kilomètres de Guivry. L’opérateur finit même par obtenir son permis de construire et l’autorisation d’exploiter par l’ancien préfet de l’Oise. D’où le recours gracieux des opposants auprès du tribunal administratif.
Si Nadine Podevin, premier magistrat de Guivry, a toujours espoir, l’édile de Beaumont-en-Beine, lui, n’en a plus du tout. « L’échéance est déjà connue. Ça se fera quand même malgré notre avis. On veut multiplier la capacité éolienne avant 2020 », assure Christian Gambart, mettant en doute la légitimité de l’administration. Selon le site Internet « Eolien en Picardie », 1 100 machines seront en effet implantées dans la région d’ici cinq ans, contre 367 en 2010. Le maire de Beaumont-en-Beine en est conscient. « Ça va pousser partout. » C’est pour cette raison que Christian Gambart, élu en mars dernier, a décidé de ne plus se battre. Même s’il reste « solidaire avec les maires de l’Aisne et de l’Oise ». « Ça se développe à grande allure, confirme Valérie Bernardeau, de l’association Stop éolien 02. Le nord de la Picardie va devenir la région la plus couverte de France. On sert d’essai. »
Le projet de cinq éoliennes sur le territoire de Guiscard semble donc déjà acté… Contactée, la société Maia Eolis, dont le siège se trouve à Lille, ne le nie d’ailleurs pas. « Nous avons l’autorisation d’exploiter et le permis de construire. Nous attendons la fin du recours pour commencer. Tout sera fait au mieux pour intégrer le parc dans le paysage », explique Bertrand Devossel, ingénieur. Selon lui, ce projet de longue date est une suite logique. « Nous avons un parc juste à côté à Villeselve-Brouchy depuis 2004. On a fait valoir la continuité. »
Christian Gambart semble avoir vu juste…
« Ils sont plus nombreux à dire oui »
Alors que d’autres s’opposent fermement à l’implantation d’éoliennes, certains n’y voient aucun inconvénient. « Malheureusement, ils sont plus nombreux à dire oui que non », constate Valérie Bernardeau, de l’association Stop éolien 02. Pourquoi ? « Pour l’argent », affirme-t-elle. Le propriétaire du terrain sur lequel se trouvent les mâts toucherait en effet « entre 5 000 et 14 000 euros par éolienne et par an ». Le promoteur éolien, lui, « 240 000 euros ».
Le maire de Mayot, Jean-Claude Niay, ne s’en cache pas. S’il attend avec impatience que ses cinq éoliennes sortent de terre, ce n’est pas pour leur beauté, mais pour leur avantage pécuniaire. Son futur parc éolien, situé à deux rues de la maison communale, sera selon lui « un revenu pour la commune ». Surtout pour ce village de 192 habitants. « Ce sont des sommes non négligeables. »
Mais selon Valérie Bernardeau, le maire de Mayot ne serait pas le seul à être tombé dans le piège en ne voyant « que l’argent à court terme ». Car, à long terme, c’est une tout autre histoire selon la spécialiste. En signant « un bail emphytéotique », le propriétaire deviendra acquéreur, à la fin du contrat, des éoliennes. Et devra donc payer le démontage de la machine… « Dans quinze ans, lorsque l’éolienne sera usée et fera plus de bruit, le promoteur s’en ira et revendra son projet. Le propriétaire du terrain devra alors payer le démontage d’un montant de 400000 euros. »
Valérie Bernardeau ne voit pas l’avenir avec sérénité, d’autant qu’en Picardie, l’éolien « se développe à grande allure ». Outre les nuisances sonores et visuelles que cela engendre, les machines seraient également mauvaises pour la santé. Autre point négatif : « les maisons situées à proximité sont invendables et dévaluées de 50 à 60 % ». À son grand dam, ces aspects ne sont généralement pas vus à temps. « Les gens s’en rendent compte une fois qu’elles (les éoliennes) sont là… »

Gaël HÉRISSÉ L'Aisne Nouvelle www.aisnenouvelle.fr/region/pays-chaunois-vent-de-protestation-contre-le-projet-de-ia16b110n169781+&cd=5&hl=fr&ct=clnk&gl=fr

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